Colis livré en retard ou perdu : que faire ?

Publié le par Jacqueline Jamet, docteur en droit

Vous avez passé une commande sur internet ou dans un magasin et votre colis n'arrive pas. Quels sont vos droits et comment réagir ?

 

Avant même de passer commande sur internet, vous devez consulter les conditions générales de vente (CGV), que vous déclarez accepter. Vous trouverez dans les CGV des clauses relatives aux modalités de livraison, au délai dans lequel le vendeur s'engage à livrer, aux recours en cas de retard ou de perte. Sachez que la livraison est régie par le code de la consommation et que le professionnel ne peut se soustraire à ses obligations. Les CGV ne peuvent donc déroger aux dispositions légales "d'ordre public" que nous vous présentons dans cet article.

 

Sommaire

Qu'est-ce qu'un retard de livraison ?

Que faire si la date de livraison est dépassée ?

Résolution du contrat et remboursement des sommes versées

Que faire en cas de perte du colis ?

Qu'est-ce qu'un retard de livraison ?

La notion de retard s'apprécie par rapport à la date de livraison prévue. Ce qui pose deux questions : qu'appelle-t'on livraison ? quelle est la date de livraison prévue ?

Qu'appelle-t'on livraison ?

La livraison est définie par le code de la consommation (article L216-1). C'est le "transfert au consommateur de la possession physique ou du contrôle du bien". Cela veut dire que le colis est remis matériellement par le transporteur à l'acheteur du bien ou à la personne qu'il a désignée dans les consignes de livraison. Cette remise se fait généralement contre émargement du bon de livraison ou signature numérisée du destinataire.

La date de livraison

Dès lors que le consommateur passe commande d'un bien, il doit savoir avant d'acheter quand il sera livré. Cela vaut pour les commandes sur internet mais également en magasin dès lors que l'article n'est pas disponible immédiatement.

Le professionnel doit indiquer la date ou le délai auquel il s'engage à livrer le bien (article L111-1 du code de la consommation). Cela fait partie de ce qu'on appelle l'obligation d'information précontractuelle (avant conclusion du contrat de vente).

A savoir que si le professionnel ne se conforme pas à cette obligation, il est passible de sanctions administratives : le consommateur peut donc se plaindre auprès de la répression des fraudes (DDPP) pour faire condamner le vendeur à payer une amende.

 

La date ou le délai doivent être précisés clairement. Il ne peut en aucun cas s'agir d'une date ou d'un délai donnés à titre indicatif. Pourtant certaines CGV continuent à le prévoir, ce qui est interdit. Mais on peut très bien trouver la mention "au plus tard le…".

A défaut d'indication de date (ce qui est par ailleurs condamnable comme on l'a dit plus haut), le professionnel doit livrer le bien "sans retard injustifié et au plus tard trente jours après la conclusion du contrat" (article L216-1 du code de la consommation).

Que faire si la date de livraison est dépassée ?

Il faut distinguer selon que la date constitue ou non pour le consommateur une condition essentielle du contrat.

Si la date de livraison est une condition essentielle

Si la date est une condition essentielle pour le consommateur, ce dernier peut mettre fin au contrat de vente dès qu'il constate que la livraison n'a pas eu lieu dans le délai prévu.

"Cette condition essentielle résulte des circonstances qui entourent la conclusion du contrat ou d'une demande expresse du consommateur avant la conclusion du contrat" (article L216-2 du code de la consommation).

 

Par conséquent le consommateur a tout intérêt, avant de valider sa commande, à inscrire que la date de livraison constitue une condition essentielle de l'achat (notamment cadeau de Noël, d'anniversaire, etc.). Il devra garder la preuve de cette mention (par exemple copie d'écran). Il peut être utile de confirmer la demande par message au vendeur relatif à cette commande.

 

Une fois la date dépassée, le consommateur peut immédiatement se dégager de son achat. A cet effet, il doit notifier au vendeur qu'il entend "résoudre le contrat" pour non respect de la date de livraison. La notification se fait "par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par un écrit sur un autre support durable" (article L216-2 du code de la consommation).

 

Tout le monde connait la lettre recommandée. Mais qu'appelle-t-on "un écrit sur un autre support durable" ?

Pour la vente à distance, le support durable est défini comme "tout instrument permettant au consommateur ou au professionnel de stocker des informations qui lui sont adressées personnellement afin de pouvoir s'y reporter ultérieurement pendant un laps de temps adapté aux fins auxquelles les informations sont destinées et qui permet la reproduction à l'identique des informations stockées" (article L221-1 du code de la consommation).

Concrètement, on admet que le consommateur peut envoyer la notification de résolution du contrat par email (courriel). Il faut bien garder la preuve d'envoi du courriel et obtenir un accusé de lecture. Il convient de vérifier dans les conditions de vente l'adresse électronique précise du service à contacter. En cas de doute il sera plus prudent d'envoyer une LRAR par courrier postal.

Si la date de livraison n'est pas une condition essentielle

En pareil cas, lorsque la date initiale de livraison est dépassée, le consommateur doit mettre en demeure le vendeur "d'effectuer la livraison (…) dans un délai supplémentaire raisonnable" (article L216-2 du code de la consommation). Ce qui est considéré comme raisonnable pour permettre au vendeur de s'exécuter s'apprécie au regard de la nature du bien, de la longueur du délai prévu au départ, etc.

Cette mise en demeure doit être effectuée "par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par un écrit sur un autre support durable". Il en va de même de la notification de résolution du contrat si le professionnel n'a toujours pas livré le bien à l'issue du délai supplémentaire. Ici encore on conservera la preuve des lettres envoyées.

Résolution du contrat et remboursement des sommes versées

Selon l'article L216-2 du code de la consommation, le "contrat est considéré comme résolu à la réception par le professionnel de la lettre ou de l'écrit l'informant de cette résolution, à moins que le professionnel ne se soit exécuté entre-temps".

Par conséquent, dès que le professionnel a reçu la lettre de résolution, vous n'êtes plus lié par votre achat. Le vendeur ne peut pas vous imposer une attente supplémentaire, par exemple en prétendant que le retard de livraison est imputable au transporteur. Cela concerne les relations entre le vendeur et le transporteur. Pour le consommateur, cela n'a aucune incidence. Seul le mécanisme de résolution du contrat prévu par le code de la consommation s'applique.

Le professionnel doit alors rembourser au consommateur la totalité des sommes versées.  Le remboursement doit intervenir au plus tard dans les quatorze jours suivant la date à laquelle le contrat a été dénoncé (article L216-3 du code de la consommation).

Des pénalités de retard sont prévues. En cas de retard de remboursement (par rapport au terme des 14 jours), la majoration due par le vendeur est de 10 % jusqu'à 30 jours de retard, de 20 % jusqu'à 60 jours et 50 % ensuite.

Que faire en cas de perte du colis ?

Il arrive parfois que vous receviez un sms ou un courriel vous annonçant que le colis est livré. Or le colis ne vous a jamais été remis. Quelle conduite tenir ?

Il faut distinguer selon que le colis est acheminé ou non par le transporteur proposé par le vendeur.

 

Si vous passez par le transporteur proposé par le vendeur. ce dernier supporte le risque de perte jusqu'à ce que le consommateur ait pris physiquement possession du bien (article L216-4 du code de la consommation). Autrement dit, tant que le colis n'est pas livré, le vendeur reste tenu de vous fournir le bien commandé. En cas de perte, il doit donc vous livrer à nouveau l'article commandé. S'il refuse, vous pouvez résoudre la vente. Le professionnel ne peut pas vous imposer de faire les démarches auprès du transporteur pour rechercher le colis.

Si le vendeur conteste la réalité de la perte, il lui appartient de prouver que le colis vous a été remis. Les transporteurs ont un système de suivi des colis et fournissent aux expéditeurs la preuve de la livraison.

 

Le consommateur peut confier la livraison du bien à un transporteur autre que celui proposé par le vendeur (c'est plutôt rare). En ce cas le consommateur supporte le risque de perte en cours de transport. En effet, comme le prévoit l'article L216-5 du code de la consommation, le risque de perte du bien est transféré au consommateur lors de la remise du bien au transporteur.

Le consommateur devra alors se retourner contre le transporteur qu'il a choisi. Les règles du contrat de transport de marchandises s'appliquent. Le transporteur ("voiturier" selon le terme légal) est garant de la perte des objets à transporter, hors cas de force majeure (article L133-1 du code de commerce). Le délai de prescription de l'action est d'un an.

Publié dans Consommation

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